Célébrer notre pays et ses citoyens devrait aussi rimer avec acheter plus de produits canadiens pour nos maisons
Ottawa, 1er juillet 2022
Lettre ouverte adressée aux premiers ministres du Canada, des provinces et des territoires en cette fête nationale
Alors que le climat se réchauffe – et je ne parle pas seulement de météo – que les conflits se multiplient loin dans le monde et aussi près que chez nos voisins, les États-Unis, il est bon de prendre un moment pour célébrer le Canada, et la paix relative qu’il nous procure. Loin d’être parfait, notre pays va quand même mieux que pas mal partout ailleurs.
Tout en célébrant, je nous invite à un moment de réflexion sur notre comportement comme consommateurs : quand on va à la quincaillerie, ne devrait-on pas, comme on le fait de plus en plus à l’épicerie, se préoccuper de la provenance de ce qu’on achète pour nos maisons ? Et par extrapolation, vous, comme décideurs, ne devriez-vous pas, tout en respectant les accords de libre-échange, favoriser par tous les moyens possibles l’approvisionnement en matériaux fabriqués au Canada pour les travaux publics ?
Les raisons d’encourager nos manufacturiers d’articles de quincaillerie et de matériaux de construction sont nombreuses. Je me limiterai à vous en partager cinq.
1. Solidifier la colonne vertébrale de toute économie : l’activité manufacturière. Même au 21e siècle et en cette ère plus virtuelle que jamais, la fabrication locale de produits industriels assure à tout pays d’éviter d’être à la merci des autres. De surcroît, elle favorise la commercialisation d’articles qui soient congruents avec ce que le climat canadien, les règles d’ici et les goûts des consommateurs soient pris en compte. Or, le secteur manufacturier est passé sous la barre des 10 % du Produit intérieur brut (PIB) du Canada alors qu’il représentait 24 % de notre économie en 1965. Chacun de nous a une responsabilité face à cette menace qui nous fragilise tous.
2. Encourager la recherche et l’innovation. La décision pour une PME ou une multinationale de produire ici plutôt que dans un tiers pays sous-tend des propriétés intellectuelles en amont, lesquels brevets protègent nos créateurs et composent un gage contre les pertes de sièges sociaux et la migration des décisions que cela entraîne.
3. Stimuler les circuits courts d’approvisionnement. Asseoir son activité manufacturière sur une grappe régionale de sous-traitance peut faire toute la différence quand une guerre ou un conflit éclate, quand le prix et la disponibilité du transport international explosent, quand une catastrophe écologique survient ou quand arrivera la prochaine pandémie. Les quelques cents ou dollars payés en plus par produit en raison de la qualité des conditions qu’on offre à nos travailleurs ici seront largement compensés lorsqu’une chaîne internationale d’approvisionnement brisera.
4. Aider à combattre l’émission de gaz à effet de serre. Les bâtiments sont responsables de 17 % des GES au Canada, en grande partie (40 %) causé par l’utilisation de combustibles fossiles pour chauffer et refroidir nos bâtiments. Mais pour brosser le portrait réel de l’énorme contribution de nos maisons au réchauffement climatique de la planète et à la perte de biodiversité qui en découle, il conviendrait d’ajouter les coûts de fabrication et de transport des produits exportés qu’on utilise dans la rénovation et la construction résidentielles. Et puisqu’il faut réduire les GES, prenons la décision de favoriser des articles de quincaillerie et des matériaux résidentiels ayant deux qualités : une traçabilité décente et des propriétés techniques qui combattent les pertes énergétiques.
5. Rendre plus robustes les finances publiques. En dix ans, la dette du Canada a approximativement doublé, grimpant le Canada dans le triste peloton de tête des pays les plus endettés par habitant. L’un des moyens les plus sûrs de réduire le poids de la dette par rapport à la taille de notre économie consiste à acheter local pour nos maisons. Un article de quincaillerie fait en Chine ou un matériau importé du Texas rapporte à un exportateur alors qu’un produit fabriqué dans une usine ici génère des revenus décuplés à l’État grâce aux impôts sur le revenu payés par les travailleurs, aux différentes taxes versées par l’employeur, sans compter l’impact d’une manufacture et de ses dizaines ou centaines de travailleurs sur l’économie municipale et souvent sur des dizaines de sous-traitants de la région.
Acheter plus de produits accrédités « Bien fait ici », c’est une façon efficace de faire face à tous ces enjeux auxquels sont confrontés les citoyens, les gouvernements et notre planète.
Richard Darveau
Président-directeur général
Organisme « Bien fait ici »