2023 en six questions et réponses
Dans son édition spéciale sur les prédictions des leaders de l’industrie, le magazine Home Improvement Retailer a posé six questions à Richard Darveau, président-directeur général de « Bien fait ici ». Voici ses réponses.
#1 Quels sont les objectifs de « Bien fait ici » pour 2023?
Élever progressivement, dans l’esprit du consommateur, l’achat d’articles de quincaillerie et de matériaux de construction fabriqués au pays au même niveau de priorité qu’est rendu l’achat local en épicerie. Acheter canadien au centre de rénovation doit progressivement devenir un réflexe.
#2 Quels sont les enjeux majeurs auxquels les quincailliers doivent faire face cette année?
Jongler avec trop d’incertitudes va user nos marchands. Le spectre d’une déflation soudaine a pour effet qu’ils ne savent plus s’ils doivent commander leurs matériaux à l’avance ou bien à la dernière minute, acheter beaucoup ou encore en petits lots. Ils se demandent si le coût du crédit va tuer le marché immobilier. Ils ont des raisons des croire que, depuis la vague de rénovation dont ils ont profité pendant la pandémie, les dollars et le temps disponibles iront plus aux loisirs qu’en habitation. Le manque de candidatures les porte à embaucher à risque quiconque envoie son CV. Bref, il y a présentement trop de variables volatiles pour que nos marchands conservent la nécessaire paix d’esprit, apte aux bonnes prises de décision.
#3 La situation des chaînes d’approvisionnement s’est-elle améliorée ou dégradée. Et pourquoi?
Si on compare à pareille date, une année plus tard, elle s’est malheureusement dégradée. La Russie n’était pas en guerre, le reste du monde non plus. La COVID était quasiment maîtrisée alors que le chaos s’est aujourd’hui emparé de la Chine. Les changements climatiques se sont pour leur part accentués, devenant plus fréquents, plus longs et plus violents. Le prix des carburants a baissé récemment, mais demeure plus élevé que l’an passé, et moins disponible dans plusieurs régions du monde. L’État de droit est menacé d’implosion dans une soixantaine de pays, soit le double par rapport à l’après-guerre. Voilà un casse-tête géopolitique qui devrait convaincre Ottawa et les associations d’affaires d’aborder sérieusement la question de notre sécurité, voire de notre souveraineté économique.
#4 Comment la consolidation va-t-elle affecter les marchands et leur chaîne d’approvisionnement?
Le phénomène va souffler le chaud et le froid sur notre industrie. Sur le plan positif, moins de joueurs va rendre plus efficientes les négociations d’achat. Une consolidation peut aussi, à l’occasion, sauver carrément des PME de la faillite. Par contre, on doit craindre une dilution dans la diversité de l’offre de produits du fait que les fusions débouchent souvent sur la rationalisation des gammes produites. Le rapport de force s’en trouve aussi modifié lorsque la concurrence se réduit, le marchand ou la bannière éprouvant plus de difficultés à trouver des fournisseurs alternatifs.
#5 Quelles occasions d’affaires s’offrent-elles aux marchands dans le contexte actuel?
Les quincailleries et les centres de rénovation qui seront précurseurs dans l’offre de produits – et de services – permettant aux habitations de devenir moins énergivores sortiront champions des prochaines décennies. Leur positionnement plaira aux déjà-convertis à la protection de l’environnement et de l’énergie tout en étant aux premières loges pour convertir les autres.
Ce sera aussi l’âge d’or (!) pour les produits et les services reliés au vieillissement de la population, lequel va entraîner non seulement une pression sur les services de santé, mais aussi la création de nouveaux produits domestiques, la révision de l’architecture de nos maisons et une réorganisation urbanistique.
L’inévitable ruée d’immigrants va forcer la construction de logements abordables à grande vitesse, une manne pour les plus opportunistes. L’occasion pour un marchand ou une usine de devenir eux-mêmes promoteurs immobiliers afin d’offrir aux nouveaux citoyens des appartements décents devrait être saisie.
Le moment est également choisi pour réviser ses heures d’ouverture et réfléchir aux opportunités d’automatiser des tâches sans grande valeur ajoutée pour la clientèle. Il presse de convier l’intelligence d’affaires, au sens propre et plus large, aux prochaines réunions portant sur le modèle d’affaires dans notre industrie.
#6 Quel conseil donneriez-vous aux marchands pour qu’ils connaissent le succès en 2023 ?
Ne faites rien comme avant, car tout a changé. Il est bel et bien révolu le temps tranquille où on pouvait conduire son entreprise en regardant dans le rétroviseur pour voir comment s’était passé le même trimestre l’année d’avant. Une main sur le volant, l’autre prête à changer souvent de vitesse, voilà comment gérer sa quincaillerie en cette année aux multiples virages appréhendés.